Journaling

J'ai toujours souffert de dépression.

Ma première défense a toujours été de m'entourer de choses à faire, de responsabilités ou d'actions pour m'obliger à rester ancrer et "utile" dans mon entourage et donner un sens à mon existence. Chaque jour est une justification de plus en plus difficile à la voix dans ma tête qui se demande s'il ne serait pas maintenant le bon moment pour arrêter de se battre. Toujours s'occuper, toujours être capable de dire "non, pas encore" a toujours été la meilleure défense, la meilleure parade à la pression constante de mon envie de lâcher prise et enfin me laisser dériver et disparaitre de la vie des autres. Pour des raisons évidentes, je ne vais pas citer d'éléments trop précis mais la famille, les amis, les collègues de travail et les obligations telles qu'un loyer à payer, une lessive à faire ou simplement un rendez-vous à organiser me permettaient, et me permettent encore dans une moindre mesure, à repousser cette voix qui s'efforce de me faire comprendre que personne ne m'apprécie réellement, que personne ne se souviendra de moi si je venais à enfin la laisser gagner. Suite à un déménagement et à une remise en question, je me suis soudainement retrouvé avec moins d'obligations, avec assez de marges pour me retrouver seul avec mes pensées et une impression de vide. Vide rapidement rempli par elle. Serait-ce maintenant le moment d'arrêter ? Serait-il maintenant le moment où plus personne n'a besoin de toi ? Après une semaine ainsi seul, dans un appartement calme et des journées de travails banales, j'ai fini par essayer d'aller courir. De sortir de mes quatre murs et de voir autres choses, d'essayer de rencontrer du monde mais le seul résultat fut de me sentir ridicule. Un idiot en train de courir seul, dans un parc sombre avec un pull trop serré laissant voir un surpoids qu'il essaie tant bien que mal de faire disparaitre. J'ai couru ainsi moins d'une semaine avant de rester enfermé à la maison et de me résigner à l'idée que je ne rencontrerais personne, que mes voisins resteront des inconnus qui tapent des pieds, hurlent à minuit et me regardent de travers lorsque je sors de mon appartement en même temps qu'eux. J'ai tenté de faire des rencontres dans le cadre du travail mais là aussi, les amitiés n'existent pas réellement. Il s'agit plutôt d'un constant jeu d'acteurs pour éviter de montrer trop de sa personne et se mettre à découvert face à des individus qui cherchent la moindre faille pour justifier une remarque, une blague qui permettrait d'écraser et dominer les autres pour éviter qu'on ne leur fasse la même chose. [[Le monde du travail est très épuisant pour moi]], je ne comprends que très peu son fonctionnement et son hypocrisie mais j'ai appris à jouer de ses codes. Il serait bon de se pencher sur ce sujet pour une prochaine fois. Finalement il ne m'aura fallu que d'une soirée particulièrement longue, à ignorer les murmures à mon oreille et les supplications de ce poids sur mes épaules, pour commencer à chercher une compagnie et par extension, une nouvelle obligation qui me permettrait de justifier mon existence continue. J'ai tenté à plusieurs reprises de me lier avec une femme, de créer une relation et d'imiter ce que font les "autres" à comprendre avoir une vie amoureuse relativement saine, une relation de confiance et des sentiments réciproques. Malheureusement même à ce niveau [[l'amour reste une énigme]] pour moi, je n'ai jamais réussi à maintenir une relation sur une durée assez longue pour y créer une raison et une réelle tristesse lorsqu'inévitablement nous nous sommes perdu de vue. Ainsi je finis par chercher la compagnie infaillible d'un animal. J'ai toujours été entouré de chiens dans mon enfance et la constante obligation de s'en occuper, de les dresser et de subvenir à leurs besoins semblaient être pour moi un bon moyen de faire taire cette pulsion incessante et de prouver que ma personne était nécessaire pour quelqu'un. Il est évident que je souhaitais également remplir le silence de mon appartement avec un autre être vivant qui serait capable de me rendre mon affection sans la crainte d'arriver au même résultat que mes conquêtes amoureuses ratées. J'ai commencé à chercher, il me fallait avant tout une histoire ou un vécu, une raison pour justifier l'adoption d'un chiot autres que la simple envie de faire taire la dépression, je ne voulais pas que mon éventuel compagnon se retrouve à être une simple béquille pour moi.